En tant qu’avocats spécialisés en fiscalité immobilière, nous accompagnons régulièrement les clients dans leurs réflexions de structuration.

Qu’ils soient salariés cadres, libéraux ou dirigeants d’entreprises, ces derniers s’interrogent souvent en parallèle de leur activité à la meilleure manière de construire un patrimoine durable.

Ce patrimoine peut revêtir différents aspects. Il peut notamment comprendre une enveloppe placée sur des supports financiers. Nous nous interrogerons exclusivement ici sur l’investissement immobilier, et notamment sur le rôle que peut jouer une société holding dans la construction de ce patrimoine immobilier à travers le temps.

Le terme de « holding » provient du verbe anglais « to hold » qui signifie détenir. L’essence même de la société holding consiste donc à acheter, gérer et parfois céder des titres participations et autres valeurs mobilières.

Au plan fiscal, la holding a toujours eu bonne presse. Souvent mise au premier plan par les clients eux-mêmes, elle constitue une sorte de mythe et d’objectif d’accomplissement personnel.

Bien que la société holding présente en effet de nombreux avantages, il ne faut pour autant pas perdre de vue les contraintes qu’elle peut engendre. Plus précisément, une vision transversale s’avère souvent nécessaire pour analyser au regard de chaque impôt ce qu’elle fait gagner, mais aussi ce qu’elle peut faire perdre.

Cette page a pour but de présenter de manière pédagogique les principaux points d’attention en matière de holding. Elle se destine à la fois aux clients curieux et aux professionnels du patrimoine immobilier qui recherchent une réponse technique, parfois non apportée par la documentation experte. Elle fera l’objet d’ajouts réguliers et vivra à travers les différentes expériences que nous rencontrons chaque jour à titre professionnel.

Afin de catégoriser chaque problématique qui nous semble pertinente en matière de holding et de fiscalité immobilière, nous avons fait le choix de diviser la présente étude en plusieurs paragraphes. Chacun d’eux mettra l’accent sur une thématique précise et abordera les forces et faiblesses de la holding au regard de chaque impôt concerné.

Avant d’entrer dans l’analyse de ces thématiques, il nous apparait nécessaire de faire un état des lieux en la matière.

La fiscalité d’une holding : croyances et vérités

Juger de la pertinence d’une société holding, c’est d’abord comprendre ce qu’elle ne permet pas et à l’inverse, découvrir ce les opportunités qu’elle offre.  

La holding n’est pas la solution miracle à une pression fiscale élevée

Écrivons-le tout de suite. Que ce soit en matière immobilière ou dans d’autres secteurs d’activité, la holding ne permet pas au client d’échapper à toute fiscalité.

La première croyance populaire concerne l’imposition des dividendes. L’idée selon laquelle une holding permet de réduire l’impôt de distribution est fausse. Elle permet seulement de faire circuler la trésorerie entre deux sociétés à moindre coût fiscal, mais la situation n’est pas comparable avec celle dans laquelle le client détient directement la filiale, puisque l’argent n’est pas chez la même personne, et ne peut donc pas être utilisé de la même manière. Ainsi, s’agissant des clients qui souhaitent disposer des sommes distribuées à titre personnel (voyages, don d’une somme d’argent par exemple) l’interposition d’une société holding entre eux et la société filiale ne présente aucun intérêt s’agissant de l’impôt sur le revenu.

La deuxième idée très répandue, liée à la première, consiste à faire croire que la société holding permet d’acheter sa résidence principale ou secondaire en limitant la fiscalité qui découlerait d’une distribution de dividende ou d’un versement de salaire. Là encore, il s’agit d’une erreur. La holding ne doit jamais participer, de près ou de loin, à l’acquisition d’une résidence d’agrément. Les problématiques soulevées par un tel schéma seraient par exemple l’abus de bien social, la donation indirecte, la constatation d’un revenu réputé distribué, le manquement délibéré et dans certains cas, l’abus de droit fiscal. Autant de termes qui doivent se suffire à eux-mêmes pour décourager toute initiative personnelle en ce sens.

En troisième croyance, on peut citer le schéma classique d’apport-cession, qui sera d’ailleurs étudié dans les développements ci-après. Cette opération consiste à apporter les titres d’une société à une holding, en vue de bénéficier d’un report d’imposition sur la plus-value d’apport. Une fois les titres logés dans la holding, celle-ci cède sa filiale et encaisse un prix net d’impôt. Le processus s’est donc déroulé sans aucune fiscalité. Cependant, il est faux d’affirmer comme on peut le lire ou le deviner dans certains articles que le client peut récupérer l’argent en franchise d’impôt à titre personnel. En effet, il est assez facile de comprendre que ce mécanisme si favorable a pour contrepartie évidente la non disponibilité de la trésorerie encaissée par la holding qui a cédé les titres de sa filiale. Certes, ces liquidités peuvent être investies et dégager un résultat, lequel sera distribuable au client, mais on ne parle plus des mêmes sommes (produit généré par l’investissement versus prix encaissé de la vente). Rappelons que, parmi les soi-disant « techniques » permettant au client de toucher personnellement les liquidités issues de la cession des titres non imposée, la réduction de capital de la holding par annulation de titres ou réduction du nominal est couverte par la doctrine qui en fait un cas mettant immédiatement fin au report d’imposition (et dégageant donc l’impôt sur la plus-value d’apport ; voir BOI-RPPM-PVBMI-30-10-60-20 n° 40, 18-8-2020).

Une société holding permet toutefois de répondre à un besoin précisément défini

Après avoir déconstruit certains a priori positifs sur la holding, il faut relativiser les propos et rappeler qu’elle constitue tout de même un outil couramment utilisé par de nombreux investisseurs, et souvent à raison. Non seulement tout n’est pas à jeter, mais au contraire, une holding peut constituer un outil de gestion fiscale très optimisant, et ce au regard de plusieurs impôts.

En matière d’impôt sur la distribution de dividendes, si la présence d’une holding n’apporte rien lorsque le client souhaite encaisser l’argent à titre personnel, il faut bien admettre qu’elle est particulièrement adaptée aux investisseurs et plus généralement, à ceux qui n’ont pas la nécessité d’encaisser l’intégralité des revenus immédiatement après les avoir réalisés. En pareil cas, l’interposition d’une holding entre le client et la société qui dégage les bénéfices permet d’arbitrer entre la part des bénéfices qu’il souhaite encaisser à titre personnel, et l’autre part qu’il souhaite réinvestir. C’est à propos de cette seconde partie des bénéfices que la holding prend tout son sens. Les dividendes qui lui sont distribués bénéficient dans la majorité des cas des dispositions de l’article 145 du code général des impôts. Ce texte permet l’application du régime des sociétés mères, évoqué couramment sous le vocable « régime mère-fille ». Grâce à ce mécanisme, la trésorerie distribuée à la holding n’est imposée qu’à un taux effectif d’environ 1,5%. Nous reviendrons ultérieurement sur les conditions en détail. Dans les cas où la société filiale ne relève pas de l’IS mais de l’IR, l’interposition d’une holding permet même une distribution de dividendes sans fiscalité, puisqu’en présence de sociétés translucides, la notion « fiscale » du dividende n’existe pas.

Au regard de l’imposition des plus-values, si le schéma d’apport-cession ne permet pas à l’apporteur d’encaisser les liquidités issues de la vente des titres, il ne faut toutefois pas occulter que le mécanisme de report d’imposition peut aboutir à la non taxation définitive de la plus-value d’apport, par exemple si les titres de la holding venaient à être transmis aux enfants dans certaines conditions. Ainsi, malgré l’indisponibilité du prix de cession pour l’apporteur, le schéma d’apport-cession présente un fort intérêt dès lors que le contribuable souhaite réinvestir ce prix. Dans ce cas de figure, la plus-value latente existant sur les titres de la filiale cédée ne sera pas fiscalisée, et c’est un prix de vente net d’impôt dont disposera la holding, là encore sous certaines conditions qui seront examinées ultérieurement.

S’agissant de la transmission, on peut avoir du mal à percevoir immédiatement l’intérêt de donner les titres d’une holding plutôt que de donner les titres des sociétés filles directement. Pourtant, bien souvent, la société holding joue un rôle clef et permet, soit une réduction des droits de mutation à titre gratuit, soit de justifier une opération ou un acte qui aurait été davantage critiquable en l’absence de holding.

Enfin, à titre de dernière illustration, on peut aussi citer l’intérêt de constituer une holding lorsque l’associé détient d’ores et déjà plusieurs sociétés. Dans ce cas de figure, la holding offre plusieurs avantages. En premier lieu, elle permet de gagner en souplesse dans la gestion de la trésorerie du groupe. Bien que la présence d’une société mère ne nous paraisse pas indispensable au regard des règles de droit commercial pour fluidifier la circulation de l’argent au sein d’un groupe, elle permet sans nul doute de gagner en confort dans la réalisation d’opérations intragroupe. En deuxième lieu, l’unification de plusieurs sociétés sous une même holding permet de faire jouer la compensation des déficits avec les bénéfices réalisés par ailleurs. Qu’il s’agisse du régime de l’intégration fiscale ou de celui de l’intégration dite « sauvage », la présence d’une holding est souhaitée pour consolider fiscalement les résultats d’un groupe. C’est ainsi que l’associé de plusieurs sociétés civiles immobilières translucides pourra décider d’apporter ses titres à une même société holding assujettie à l’IS, de sorte à compenser les bénéfices des unes avec les déficits réalisés par les autres.

En synthèse, la société holding n’est pas un remède contre l’impôt. Elle ne doit jamais être considérée comme un outil permettant d’éluder la fiscalité d’une opération. En revanche, elle permet de mieux organiser la gestion de son patrimoine et parfois, de réduire les frottements fiscaux attachés à une activité en vue de disposer de davantage de liquidités à réinvestir que celles dont aurait bénéficié le contribuable en son absence.

A présent, il convient d’analyser en détail plusieurs thèmes fiscaux dans lesquels la holding joue un rôle.