Une fois le patrimoine immobilier développé, vous chercherez probablement le meilleur moyen d’en faire la donation à vos enfants.

Le système français favorise les donations en étant jeune. Plus les propriétaires de patrimoine immobilier vieillissent, plus le coût fiscal de cette transmission est important.

Plusieurs dispositifs fiscaux existent pour limiter la fiscalité d’une donation de patrimoine. Avant de consulter un notaire, il peut être utile de vous rapprocher d’un avocat fiscaliste spécialisé en fiscalité patrimoniale qui pourra vous aiguiller sur les démarches à réaliser et la chronologie des étapes à respecter.

Donner un immeuble à ses enfants constitue une décision mûrement réfléchie qu’il convient de peser. Plusieurs outils juridiques sont à votre disposition et doivent vous être présentés, afin de choisir ensemble la voie la plus adaptée à votre situation particulière.

Vous vous interrogez sur l’opportunité de créer une SCI ? Faut-il donner la nue-propriété ou la pleine propriété d’un bien immobilier ? Peut-on conserver un contrôle suffisant sur le patrimoine après l’avoir donné à ses enfants ?

En tant qu’avocats experts en fiscalité du patrimoine immobilier, nous vous accompagnons dans toutes vos réflexions et pouvons vous conseiller sur la meilleure stratégie à adopter.

La donation au moyen d’un démembrement de propriété

La pleine propriété d’un bien immobilier se décompose en usufruit et en nue-propriété.

Faut-il donner la nue-propriété d’un bien immobilier ?

Généralement, lorsque vous construisez votre patrimoine immobilier, vous détenez la pleine propriété des actifs. Autrement dit, vous possédez tous les attributs sur vos biens. Par exemple, vous pouvez les louer, les habiter, encaisser les revenus locatifs ou encore décider de les vendre pour toucher le prix de vente.

La pleine propriété comprend en réalité deux droits distincts. Il s’agit de l’usufruit et de la nue-propriété.

L’usufruit renvoie à l’usus et au fructus c’est-à-dire le droit d’user du bien et d’en encaisser les fruits. S’agissant d’un immeuble, l’usufruitier peut l’habiter, mais aussi le louer et toucher les loyers.

A l’inverse la nue-propriété correspond à l’abusus autrement dit le droit de disposer du bien. Le nu-propriétaire peut donc encaisser le prix de vente de l’actif immobilier.

Pourquoi lit-on souvent qu’il faut donner seulement la nue-propriété d’un bien immobilier ? Cela s’explique par plusieurs raisons, dont certaines sont d’ordre juridique et d’autres d’ordre fiscal.

Au plan juridique, donner la nue-propriété permet de ne donner qu’une partie de la pleine propriété. Ainsi, les parents conservent l’usus et le fructus. Cela signifie qu’ils pourront continuer à habiter dans le bien, ou s’il s’agit d’un investissement locatif, le louer et encaisser les revenus. Ce garde-fou est souvent apprécié des parents, qui veulent donner l’immeuble aux enfants mais continuer à en percevoir les revenus. En conservant l’usufruit, les parents s’assurent donc un revenu complémentaire jusqu’à leur décès.

Au plan fiscal, il faut aller lire l’article 669 du code général des impôts. Cette disposition indique la valeur taxable aux droits de donation. Lorsque les parents ne donnent que la nue-propriété d’un bien immobilier, ils ne paieront des droits que sur cette nue-propriété. Celle-ci a nécessairement une valeur moindre que la pleine propriété puisqu’il s’agit d’un droit réduit. L’article 669 nous indique que la nue-propriété correspond à une fraction de la pleine propriété, déterminée en fonction de l’âge de celui qui reste usufruitier. Par exemple, si les parents qui demeurent usufruitier après la donation ont entre 51 et 61 ans, la valeur de la nue-propriété donnée aux enfants sera égale à 50% de la valeur en pleine propriété. Ainsi si l’immeuble vaut 1 million d’euros en pleine propriété, la nue-propriété donnée vaudra 500 000 euros. L’intérêt fiscal consiste donc à réduire l’assiette des droits de donation.

Le démembrement de propriété fait effet de levier sur la transmission

En donnant la nue-propriété d’un immeuble, les parents transmettent une valeur moindre que la vraie valeur du bien. Par conséquent si le patrimoine comprend plusieurs biens, ils pourront en donner davantage et la transmission n’en sera que plus efficace.

Les droits de donation s’appliquent à une donation entre un donateur et un donataire. Il s’agit d’un barème progressif qui augmente avec la valeur de la part transmise. En réduisant cette part à la seule nue-propriété, on limite les droits de donation. Dès lors, un démembrement de propriété sur un immeuble permet de réduire la fiscalité de la transmission.

Si la donation concerne les parents avec les enfants, un abattement de 100 000 euros s’applique sur la part transmise. L’abattement s’applique sur la valeur nette transmise. Autrement dit, si l’on ne donne que la nue-propriété, il faut appliquer l’abattement après démembrement. Ainsi, sur un bien valorisé à 1 million d’euros en pleine propriété, et si la nue-propriété ne vaut que 500 000 euros, l’abattement fera que la transmission ne sera taxable que sur 400 000 euros.

Ce faisant, nous réduisons fortement la fiscalité sur les donations d’immeubles grâce à cette technique.

L’article 669 s’applique obligatoirement. Vous ne pouvez pas retenir une autre valeur de la nue-propriété que celle édictée par le code général des impôts. Par exemple vous ne pouvez pas retenir une valeur économique de l’usufruit. En effet, certains clients cherchent à appliquer la méthode dite « DCF » pour discounted cash flows. Parfois, cette méthode a pour effet de survaloriser l’usufruit notamment pour les biens rentables. Par opposition, la nue-propriété perd donc en valeur ce qui permet de réduire encore davantage le coût de la transmission. Malheureusement, cette méthodologie n’est pas admissible et vous risquez un contrôle fiscal.

De la même manière, il n’est pas possible d’effectuer un double démembrement de propriété. En effet, on pourrait se demander si l’enfant ayant reçu la nue-propriété ne peut pas lui-même procéder à une donation portant sur la nue-propriété de la nue-propriété. Ce schéma est clairement abusif et nous vous déconseillons fortement de le mettre en place.

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La fiscalité d’un démembrement de parts sociales

Plus intéressant que le démembrement d’un bien immobilier, on peut envisager un démembrement de parts sociales.

L’intérêt d’apporter un bien à une SCI avant de démembrer les parts

En donnant la nue-propriété d’un bien, on a vu que la transmission était plus optimisée qu’en donnant la pleine propriété.

Pourtant, le conseil en fiscalité peut aller plus loin et donner davantage d’optimisation au client. C’est notamment le cas lorsque le patrimoine comprend des emprunts bancaires. Dans ce cas, la donation de la nue-propriété du bien ne porte que sur l’actif immobilier. En effet on ne peut pas sérieusement envisager de donner la dette bancaire à ses enfants, surtout s’ils sont mineurs. Par ailleurs, la banque ne sera vraisemblablement jamais d’accord pour que sa créance passe d’un débiteur à un autre. Par conséquent si la dette ne suit pas l’immeuble, la valeur taxable aux droits de donation n’est pas réduite à due concurrence. Cela signifie que la donation sera taxée sur la valeur de l’immeuble brute, sans défalquer la dette bancaire.

A l’inverse lorsque le bien figure dans une SCI, la dette est au passif de la société. Or ce n’est plus le bien immobilier qui est donné mais les parts sociales. Par conséquent, c’est la valeur des parts sociales qu’il convient de déterminer et non pas la valeur du bien. Nous avons généralement recours à la méthode des capitaux propres réévalués ou encore l’actif net réévalué. En prenant le bilan de la SCI, nous calculons la valeur nette des parts en remplaçant la valeur brute de l’immeuble par sa valeur vénale.

Dans ce calcul la dette bancaire peut être déduite ce qui fait que la valeur des parts est sensiblement inférieure. Indirectement, l’emprunt bancaire réduit la valeur de la donation. Comme pour un bien immobilier, on peut tout à fait démembrer la propriété des parts sociales d’une SCI. Ce démembrement se produit directement dans l’acte de donation lorsque les parents décident de ne donner que la nue-propriété des parts de la SCI aux enfants.

Cela constitue une différence sensible entre la donation d’un bien immobilier et la donation des parts d’une SCI.

Au-delà de l’emprunt il faut aussi préciser que les biens immobiliers en SCI bénéficient d’une décote. On peut donc envisager de donner les parts sociales en appliquant un abattement de l’ordre de 15% par rapport à la valeur vénale du bien immobilier. Cette décote pour illiquidité des titres de la SCI permet encore de réduire les droits de donation. Il faut cependant être particulièrement vigilant et ne pas être trop agressif afin d’éviter un contrôle fiscal et une proposition de rectification.

Les statuts d’une SCI adaptés à un démembrement des parts sociales

L’autre avantage de créer une SCI pour transmettre son patrimoine immobilier est d’ordre purement juridique.

En effet, une situation de démembrement crée des droits concurrents sur un même bien. Or s’il est possible de rédiger une convention ou bien de prévoir une répartition des droits dans l’acte de donation, on ne pourra pas régler toutes les situations. Autrement dit, les parents usufruitiers pourront parfois être dans l’obligation de rendre des comptes aux enfants nus-propriétaires. Cette situation est assez désagréable notamment lorsque les enfants deviennent majeurs et se marient. On peut arriver dans des situations de mésentente voire de blocage qui rendent le démembrement sur un bien immobilier particulièrement risqué. Ce risque n’est pas conseillé surtout si le bien immobilier constitue la résidence principale des parents.

Pour palier à cela, nous conseillons toujours en tant qu’avocats de constituer une SCI pour rédiger les statuts. En effet, les statuts de la société décrivent toutes les règles de fonctionnement. Ainsi on prévoit les majorités des décisions et on peut précisément choisir ce à quoi les associés on droit ou non. Par exemple en écrivant que le nu-propriétaire n’a pas le droit de vote, on réserve une grande protection aux parents qui peuvent prendre toutes les décisions dans la société. Bien évidemment le conseil devra prendre garde à la rédaction des clauses statutaires afin qu’elles ne soient pas jugées nulles ou abusives en cas de litige.

Outre la prise de décision on peut aussi désigner les parents gérants à vie de la société ce qui va permettre d’accentuer leur contrôle sur la société. Ce faisant, ils conserveront tous les pouvoirs dans la société jusqu’à leur décès. On peut même envisager que ces pouvoirs soient transmis au parent survivant lorsque l’un des deux va décéder. Ainsi, le conjoint survivant conservera les pleins pouvoirs jusqu’à son propre décès et ce n’est qu’à partir de cette date que le démembrement prendre fin sur les parts sociales de la SCI.