Le PEA (plan d’épargne en actions) bénéficie d’une fiscalité favorable pour les particuliers souhaitant détenir des placements financiers.
Il s’agit d’un outil d’investissement intéressant à détenir dans le cadre d’une stratégie de fiscalité patrimoniale. Pour autant, les avantages fiscaux du PEA cachent aussi des contraintes assez fortes. Certaines d’entre elles concernent l’éligibilité des actions au régime fiscal du PEA. D’autres constituent la conséquence du PEA et marquent sa différence avec le régime du compte titre ordinaire.
L’éligibilité au PEA intéresse non seulement le porteur d’actions mais également la société émettrice. En effet, l’attribution de titres éligibles à ce support fiscal optimisé constitue un atout de taille pour les sociétés.
Contrairement aux idées reçues, l’activité de l’entreprise ne constitue pas une condition d’éligibilité des actions au PEA. Par exemple, une société immobilière peut en principe revendiquer le bénéfice de ce régime fiscal.
En revanche, de nombreuses règles restreignent en pratique le champ d’utilisation du PEA.
Le PEA comme alternative fiscale au compte titres ordinaire
Quelles différences de fiscalité existe-t-il entre une PEA et un compte titres ordinaires ?
Le PEA bénéficie d’une fiscalité plus clémente
Un plan d’épargne en actions (PEA) fait l’objet d’une loi fiscale spécifique. La règlementation fiscale diffère de celle applicable aux autres comptes titres.
Ainsi, on rappelle que l’ouverture d’un compte titres classique n’ouvre droit à aucun avantage fiscal. Lorsqu’un client investit sur un compte titres ordinaire, il ne jouie d’aucune exonération fiscale. Tous les gains supporteront la fiscalité à l’impôt sur le revenu.
Les dividendes encaissés relèvent du régime des produits de placements. Si une société assujettie à l’IS détient ce compte titres, ils supportent l’impôt sur les sociétés au taux de droit commun. Il en va de même des plus-values sur titres réalisées sur le compte titres.
A l’inverse lorsqu’un particulier détient un compte titre, il supporte en principe le prélèvement forfaitaire unique sur les gains réalisés. Le taux de 30% aussi appelé « flat-tax » s’applique tant aux dividendes qu’aux plus-values sur valeurs mobilières. Néanmoins, vous pouvez toujours opter pour l’imposition au barème progressif. Prenez garde au fait que l’option s’applique globalement au titre d’une année fiscale. Autrement dit en cas d’imposition des gains au barème progressif, tous les revenus de capitaux mobiliers supporteront le barème progressif. Cette option doit faire l’objet d’une étude fiscale particulière. En particulier, les clients dotés de revenus financiers importants doivent consulter leur avocat fiscaliste avant d’effectuer un choix. Parfois, le coût du barème progressif excède celui de la flat-tax. En revanche dans d’autres cas, l’application d’un abattement fiscal permet de réduire la fiscalité.
Les gains encaissés dans un PEA ne subissent pas le même sort. Au plan fiscal, le législateur a instauré une exonération.
Tous les produits des placements effectués dans le PEA bénéficient d’une exonération d’impôt sur le revenu. La seule exception concerne les produits de placement des titres non cotés. Dans ce cas, il existe un mécanisme de plafonnement de 10% des placements sur le PEA. Cette règle méconnue fait l’objet de nombreuses questions d’ordre pratique. Ainsi, on peut s’interroger sur la notion de produits de placements du PEA. Concernent-ils seulement les dividendes ? En pratique l’administration fiscale étend le plafonnement de 10% aux sommes imposées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. On peut donc par exemple l’étendre aux sommes issues d’un boni de liquidation. Par ailleurs, faut-il retenir comme ratio de calcul la valeur réelle des titres ou bien leur valeur d’acquisition ? Là encore, la réponse pénalise fiscalement le contribuable puisqu’il doit retenir le prix d’achat des actions sur le PEA.
Cette règle nécessite souvent une analyse fiscale pointue et nous vous recommandons en cas d’enjeu important de nous consulter.
Une consultation fiscale apparait d’autant plus importante que le dépassement de ce plafond entraine l’exigibilité de l’impôt. Or, il ne s’agit pas de la flat-tax à 30% mais de l’impôt sur le revenu. Par conséquent, tout excès au-delà de la règle des 10% du PEA supportera le barème progressif.
En revanche nous portons à l’attention des clients que l’imposition de cette fraction ne leur donne pas le droit d’encaisser les liquidités. En effet on pourrait se demander si le client peut récupérer l’argent imposé à l’IR ? Non, puisque cela entrainerait la clôture du PEA et la fin de la fiscalité avantageuse. Autrement dit, le teneur du compte doit inscrire la somme nette sur le compte espèce du PEA du titulaire.
Hormis ce plafonnement de l’exonération de fiscalité à 10%, le PEA fait office d’enveloppe fiscale attractive. Aucune fiscalité ne s’applique, pas même les prélèvements sociaux sur PEA. Rappelons toutefois qu’il faudra en tenir compte lors des retraits du PEA qui créent une fiscalité réduite.
Quels titres peut-on inscrire sur un PEA ?
La question ne porte pas sur la fiscalité à proprement parler, quoi que. L’inscription de titres non admis sur un PEA peut mettre fin au plan et donc faire perdre l’avantage fiscal. Les clients doivent faire preuve de la plus grande vigilance pour conserver l’exonération de fiscalité.
A support fiscal optimisé s’attache des règles strictes d’éligibilité. Tous les titres ne peuvent pas figurer sur un PEA bien au contraire. La liste des titres admis figure au sein du code monétaire et financier.
En premier lieu, citons le cas des actions de préférence non éligibles au PEA. Ces titres ont le vent en poupe depuis de nombreuses années en raison de leur souplesse. Les avocats fiscalistes les conseillent souvent aux sociétés qui désirent accorder des droits particuliers. Parfois, il s’agit du seul outil juridique permettant de remplir l’objectif d’un groupe d’associés. Pour autant, il faudra les alerter sur le caractère non éligible au PEA ou PEA PME.
Retenons que le PEA peut accueillir les autres actions ainsi que les parts sociales de SARL. La société doit avoir son siège en France ou dans l’Union européenne. Elle doit relever de l’impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun. En effet, seuls des cas très rares permettent l’éligibilité au PEA lorsque l’assujettissement à l’IS résulte d’une option. Par exemple, une SCI optant pour l’IS ne bénéficie pas de cette éligibilité.
Les SICAV, FCP et OPCVM peuvent bénéficier d’une éligibilité au PEA. Toutefois là encore, cette règle comporte de nombreuses exclusions fiscales que nous vous invitons à vérifier en amont. Toute infraction aux règles et aux quotas d’investissement permettra au service fiscal de supprimer l’avantage de fiscalité du PEA.
A l’inverse des titres éligibles, le code monétaire et financier donne aussi une liste non exhaustive des titres non éligibles au PEA. Rappelons que les actions de préférences font l’objet d’une exclusion de principe. Cela concerne aussi le cas des bons de souscription d’actions aussi appelés BSA. Dans cette catégorie, le cas des bons de souscription de parts de créateurs d’entreprises interroge. Cette forme de titres aussi appelés « BSPCE » a fait couler beaucoup d’encre en fin d’année 2023. En effet la doctrine administrative interdit leur souscription via un PEA. Mais le point de droit concernait surtout les titres auxquels ces droits permettaient de souscrire. Par exemple, les actions remises en exercice de BSPCE peuvent-elles figurer sur un PEA ? Le Conseil a d’Etat a répondu par l’affirmative dans un arrêt remarqué du 8 décembre 2023 numéro 482922.
Alors que le BSPCE demeure non éligible au PEA, l’action remise contre le BSPCE peut bénéficier de l’enveloppe fiscale du PEA.
Le cabinet AGBC AVOCATS conduit actuellement une réclamation s’agissant des BSA dont le régime peut sembler proche. En effet, les BSPCE ne sont au final qu’une forme particulière de BSA. Alors que la jurisprudence fiscale a rendu une décision favorable aux BSPCE, on voit mal comment l’administration pourrait nous refuser le droit d’inscrire les actions remises contre des BSA sur un PEA. Vous pouvez nous contacter si vous vous trouvez dans ce cas de figure.
Les autres exclusions concernent par exemple les titres faisant bénéficier leur porteur d’un autre régime fiscal favorable. On peut citer les actions ouvrant droit à la réduction d’impôt Madelin pour investissement dans des PME.
Enfin, un autre cas important en pratique concerne les participations de plus de 25% au capital de la société. Cette limite pose un très grand nombre de questions fiscales d’ordre pratique. D’abord, rappelons qu’il faut la calculer avec les détentions directes et indirectes. Ensuite, rappelons que ce seuil doit s’apprécier tout au long de la vie du PEA mais aussi 5 ans avant la souscription des actions sur ce même plan. Enfin et surtout, le champ d’application concerne le contribuable mais aussi son épouse, partenaire, et les ascendants et descendants du foyer. Autrement dit, tous les groupes familiaux vont connaitre avec cette règle une limite important à la fiscalité favorable du PEA. Notons qu’il existe toutefois des mesures de tolérance. Rapprochez vous d’un avocat fiscaliste spécialisé en PEA pour savoir si vous pouvez en bénéficier.
Autre cas d’exclusion, il concerne le rachat de titres appartenant déjà au contribuable. En revanche, le texte ne semble viser que les rachats auprès du redevable, son épouse sa partenaire ou ses ascendants ou descendants. Quid si le contribuable rachète sur un PEA les titres qu’il détenait avec une société lui appartenant ? Sauf procédure d’abus de droit, le cas ne devrait pas devoir poser de problématique mais vous devez systématiquement faire valider cette opération par un conseil fiscal avisé de ces sujets.
Enfin, relevons que les titres des sociétés d’investissement immobilier cotées n’entrent pas dans un PEA. L’exclusion vaut aussi pour toutes les sociétés foncières européennes comparables. On peut par exemple citer le cas des REIT en droit britannique. Tous les titres de SIIC inscrits sur le PEA avant le 21 octobre 2011 peuvent continuer à figurer. On appelle ceci une clause grand-père du PEA. Cependant attention, tout échange de titres ou distribution de dividendes en actions met en principe fin au PEA. Pour éviter cela, vous devez régulariser votre gestion fiscale du PEA sous 2 mois maximum. Nous vous assistons dans cette démarche.
Quelles sont les contraintes d’un PEA ?
En contrepartie de la fiscalité avantageuse pour son propriétaire, le PEA présente des restrictions d’utilisation.
PEA et transmission lors d’une donation
L’article L221-30 du code monétaire et financier pose une règle stricte. Un PEA ne peut avoir qu’un seul titulaire. De cette règle découlent certaines conséquences que le titulaire du plan doit connaitre.
Il ne peut pas donner son PEA à quelqu’un d’autre. Autrement dit, il est impossible de transmettre un PEA à ses enfants. La donation du PEA aux héritiers constitue un cas de clôture du plan. En revanche, rien n’interdit au titulaire du PEA de le clôturer et de transférer les titres sur un compte titres ordinaire. Dans ce cas il pourra tout à fait donner la propriété des actions à ses héritiers et optimiser la fiscalité de la donation.
De la même manière on ne peut pas démembrer un PEA à la différence d’un compte titres. Par exemple, vous ne pouvez pas donner la nue-propriété du PEA à vos enfants. A l’inverse, vous pouvez tout à fait démembrer la propriété d’un compte titres ce qui reste une opération fiscalement intéressant. Dans cette ligné, les titres figurant sur le plan ne peuvent pas non plus faire l’objet d’un démembrement. Cela résulte d’une décision de rescrit reprise au Bofip (décision de rescrit 24-10-2006 n° 2006/45). Le démembrement est incompatible avec le PEA, qu’il intervienne avant l’achat des actions sur le plan ou pendant la durée de vie du plan. Par exemple, vous ne pouvez pas acheter l’usufruit d’actions sur PEA. Vous ne pouvez pas non plus acheter la pleine propriété de ces actions et donner la nue-propriété à vos enfants. Dans les deux cas, cela entraine la clôture du plan.
Par conséquent, si le PEA offre des avantages fiscaux s’agissant des dividendes et plus-values, il en va différemment de sa transmission. Plus précisément, le PEA ne constitue pas un outil de transmission et cette conséquence doit fait l’objet d’une anticipation.
Quel sort réserver au PEA lors d’une succession ?
Le PEA ne se transmet pas à titre gratuit via une donation. Mais le PEA ne se transmet pas non plus lors d’une succession. Les clients s’interrogent souvent sur le devenir de leur plan au jour de leur décès. Peut-on transférer la propriété du PEA à ses héritiers lors de son décès ? Malheureusement, un PEA ne se transmet pas à cause de mort.
Le jour du décès du titulaire du PEA, sa succession s’ouvre avec le paiement des droits de succession sur PEA. Plus précisément, la valeur réelle des titres et le numéraire sur le compte espèces intègrent la succession du défunt. Pour autant, les titres ne sont pas vendus. Cela signifie qu’il faut suffisamment de liquidités pour payer les droits de succession sur le PEA.
Cette conséquence souvent méconnue des clients doit faire l’objet d’une étude particulière. Par exemple, nous pouvons arbitrer à partir d’un certain âge entre la conservation du PEA ou sa conversion en compte titres ordinaires. Certes le régime fiscal est moins favorable mais la transmission du PEA sera facilitée.
L’autre question dans le cadre d’une succession et d’un PEA concerne les héritiers. Une fois le PEA clôturé du fait du décès, peuvent-ils transférer les titres sur leur propre PEA ? Cette opération n’est pas possible juridiquement. En effet, le PEA fonctionne avec un compte titres et un compte espèces. Les titres souscrits doivent provenir d’une souscription via le compte espèces du PEA concerné. Les enfants ne pourront donc pas transférer les actions du PEA de leur famille sur leur PEA. En revanche rien ne leur interdit de céder les actions reçues et réinvestir les liquidités dans leur PEA. Ils doivent toutefois veiller au respect des plafonds de versements sur un PEA.
Le PEA est-il adapté aux restructurations des sociétés ?
Obéissant à des règles contraignantes, on peut légitimement se demander si l’inscription d’actions sur un PEA ne constitue pas un fardeau en vue d’une future restructuration de sa société.
Apport de titres et PEA
Dans les sociétés créées à plusieurs associés, la participation inférieure à 25% peut permettre d’inscrire les actions sur un PEA. Cet effet d’aubaine ne séduit pas tous les clients pour une raison très simple liée aux restrictions fiscales du PEA. Comme son régime fiscal bénéficie de très nombreux avantages, les clients pensent qu’il sera très compliqué d’en sortir. Plus précisément, on peut penser que les actions sur un PEA rendront impossibles toutes les restructurations nécessaires de la société. Par exemple, que se passe-t-il si le titulaire du PEA doit apporter ses actions à une holding ? Autrement dit, peut-on apporter à une holding des actions sur PEA ?
On sait que l’apport de titres bénéficie généralement d’un report d’imposition. Mais ce dispositif est-il applicable avec des actions sur un PEA ?
En réalité, le PEA se révèle être un outil particulièrement avantageux en cas de restructuration. Le transfert d’actions vers une holding peut se dérouler dans le PEA sans fiscalité. Cette règle quasiment méconnue résulte de la doctrine de l’administration fiscale. Dans les faits, le régime fiscal du PEA continue à s’appliquer aux titres remis en échanges à condition qu’ils soient éligibles au même régime.
Ainsi, si un associé apporte les titres de sa société à une holding, les titres de la holding pourront rester sur le PEA. Comment traiter la plus-value d’apport de titres figurant sur un PEA ? Cette plus-value d’apport bénéficie du régime d’exonération d’impôt sur le revenu. Autrement dit, le titulaire du plan peut recevoir des titres en échange et purger sa plus-value fiscale. En revanche les prélèvements sociaux restent dus. Toutefois, dans la mesure où le PEA n’est pas clôturé, ils ne deviendront exigibles que lors du retrait du PEA. Il n’y a donc pas de liquidités à utiliser pour payer une fiscalité. L’opération d’apport de titres se fait en toute neutralité fiscale au sein du PEA.
Points de vigilance et restructurations dans le cadre d’un PEA
La principale forme de restructuration constitue le transfert des titres sur PEA à une holding. Aussi, sachant que sa société va prendre de la valeur, un contribuable ayant créé sa société pourrait habilement céder ses titres à une holding dans laquelle il ne détient que 25% du capital pour rendre la participation éligible au PEA. Ce schéma souvent appliqué permet de réaliser d’importantes économies d’impôt. En effet, on sait que la plus-value future bénéficiera d’une exonération fiscale non plafonnée. Nous alertons toutefois les clients sur cette stratégie fiscale qui présente deux axes de critiques. Le premier résulte de la procédure de l’abus de droit sur un PEA. En effet l’administration peut considérer l’interposition de la holding comme abusive. Cependant, d’après notre expérience les circonstances de l’affaire peuvent expliquer la démarche. Dans ce cas de figure, les justifications permettent d’éviter l’abus de droit. Nous vous conseillons de nous consulter suffisamment en amont pour vous faire assister.
En revanche l’administration peut aussi critique le prix de cession des titres sur le PEA. Par exemple, il ne faudra pas sous-évaluer les titres sur le PEA. En effet, même si le seuil de 25% est respecté, l’administration pourrait considérer la valeur d’acquisition comme minorée. Le juge a d’ailleurs déjà ouvert la porte à une rectification sur ce sujet.
La deuxième restructuration concerne les dirigeants associés qui cèdent leur entreprise dans le cadre d’un management package. Par exemple on imagine le cédant qui inscrit les titres de la holding de reprise sur un PEA et encaisse par ce biais des compléments de salaires sous forme de dividendes. Ce faisant, ces compléments de salaires ne supportent aucune imposition et le contribuable évite à la fois l’impôt et les cotisations sociales. Nous alertons sur cette pratique particulièrement douteuse que l’administration sanctionne très sévèrement via la procédure de contrôle des abus de droit. Le juge donne très souvent raison à l’administration fiscale dès lors qu’elle parvient à apporter la preuve que les sommes encaissées sur le PEA ne constituent pas des produits de placements mais des salaires déguisés.