Le schéma d’apport-cession consiste à placer en report d’imposition une plus-value d’apport sur titres, avant que ceux-ci ne soient cédés. Lorsque la cession suit immédiatement l’apport des titres à la holding, le maintien du report d’imposition implique un réinvestissement économique.
Ce réinvestissement économique doit porter sur 60% du prix de cession des titres.
Tandis que la doctrine exclut du réinvestissement économique les activités de location immobilière, elle ne ferme toutefois pas la porte à toutes les activités liées à l’immobilier.
Les activités d’achat-revente et de promotion peuvent notamment permettre de remployer la quote-part du prix de cession et ainsi maintenir le report d’imposition.
Le mécanisme du report d’imposition
Ce schéma permet d’obtenir un différé d’imposition et ainsi, de maximiser la trésorerie.
L’article 150 0 B ter du code général des impôts
La cession des titres d’une société s’accompagne généralement d’une plus-value pour l’associé fondateur. Lorsque celui-ci n’a pas besoin d’encaisser des liquidités à titre personnel, le schéma d’apport cession offre une opportunité intéressante au plan fiscal.
Plutôt que de supporter en principe l’impôt au taux de 30% sur la plus-value, il s’agit de réaliser un apport des titres au profit d’une société holding. Cet apport bénéficie de plein droit d’un report d’imposition lorsque certaines conditions sont remplies.
Le report d’imposition consiste à ne pas imposer immédiatement la plus-value d’apport.
Les titres étant ensuite cédés par la holding pour la même valeur que celle pour laquelle ils lui ont été apportés, aucune plus-value n’est matérialisée et aucun IS n’est prélevé sur la cession. Ce faisant, la vente de la société s’opère sans fiscalité.
Le texte pose principalement deux contreparties. D’une part, le contribuable ne peut pas appréhender les liquidités tirées de la vente des titres par sa holding. Toute réduction de capital ou annulation de titres de la holding aurait pour conséquence de mettre fin au report d’imposition. D’autre part, si la cession a lieu dans les trois ans suivant l’apport, la holding doit réinvestir 60% du prix de cession. Ce réinvestissement doit porter sur une activité économique.
Comment réinvestir dans une activité économique liée à l’immobilier ?
Les activités de gestion de son propre patrimoine immobilier n’entrent pas dans cette définition. La doctrine prévoit expressément cette règle (BOI-RPPM-PVBMI-30-10-60-20 n° 100, 18-8-2020). Elle exclut donc le réinvestissement dans une activité de location d’immeubles nus. Mais elle concerne aussi les locations d’immeubles meublés ou équipés. En effet, rappelons que la location immobilière, qu’elle soit nue ou meublée, demeure une activité civile. Ce n’est qu’au plan fiscal que l’article 35 assimile la location meublée à une activité commerciale.
En revanche, l’achat revente et la promotion immobilière constituent des supports éligibles au réinvestissement économique. Dans les deux cas, il ne s’agit plus d’acquérir un immeuble en vue d’en retirer des recettes récurrentes. En effet, les marchands de biens comme les promoteurs effectuent des actes de commerce puisqu’ils achètent en vue de revendre.
Quelle forme doit prendre le réinvestissement économique dans une activité immobilière ?
Le réinvestissement économique doit s’effectuer selon des modalités pratiques bien particulières.
Le financement des moyens d’exploitation
La première possibilité consiste à affecter les 60% du prix de cession dans le financement de moyens permanents d’exploitation affectés à une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière.
Le financement d’une activité éligible s’entend de l’acquisition par la holding de moyens permanents affectés à sa propre exploitation. Cela vise par exemple l’acquisition par la holding de biens immobiliers nécessaires à l’exploitation de son activité. Cela ne fonctionne pas lorsque la société acquiert un actif qu’elle immobilise mais affecte à un emploi autre (mise à disposition des associés par exemple).
Cette condition d’affectation à l’exploitation date de 2017. Avant, l’article prévoyait le simple financement d’une activité opérationnelle. Cependant, la doctrine administrative avait déjà précisé que cette condition n’était pas satisfaite si la société remployait le produit de la cession par des apports en compte courant sauf à ce que ce compte courant ait permis l’acquisition d’actifs nécessaires à son activité.
La jurisprudence avait a plusieurs reprises retenu une approche différente. La cour administrative de Nantes a par exemple accepté de considérer une avance en compte courant d’associé comme éligible au remploi (CAA Nantes 23-12-2022 n° 20NT03798).
Cependant, le nouveau texte en vigueur depuis le 1er janvier 2017 ne semble plus permettre cette approche, ce qui peut paraitre étonnant si l’on met cette règle en parallèle du principe de liberté dans le mode de financement d’une société, déjà consacré par la jurisprudence.
En synthèse, on déconseillera aux opérateurs marchands et promoteurs de financer leurs opérations au sein de filiales via des avances en compte courant d’associé.
La pratique suivante semble davantage appropriée et sécurisée au plan fiscal.
Souscription au capital d’une filiale
Le report d’imposition est maintenu si la holding s’engage à réinvestir 60% du prix dans la souscription en numéraire au capital d’une société répondant aux conditions d’activité, d’imposition à l’IS et de localisation du siège.
La société filiale doit satisfaire à la condition d’activité prévue au premier alinéa de l’article 150-0 D ter, II-3°-b du CGI. Ainsi la société doit par exemple avoir pour objet d’exercer une activité commerciale sous la même exclusion relative aux activités de gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier.
Dès lors que la société holding n’a pas vocation à réaliser elle-même l’activité immobilière, il sera préférable qu’elle constitue une filiale avec un capital élevé. Ce faisant, l’obligation de réinvestir la quote-part du prix de cession sera remplie et le report d’imposition appliqué sur la plus-value d’apport pourra perdurer.
Signalons enfin que les titres de la filiale doivent être conservés pendant au moins douze mois à compter de la date de leur inscription à l’actif de la société.
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