La durée de détention joue un rôle particulier en fiscalité immobilière. En effet, le temps occupe une place centrale dans l’élaboration des différentes règles fiscales.

Parmi les exemples les plus parlants, on peut citer les abattements pour durée de détention en matière de plus-value. Ce mécanisme de dégressivité de l’impôt en fonction du temps a pour effet d’inciter les particuliers à ne pas spéculer sur la hausse des prix de l’immobilier. Mais il ne s’agit pas du seul exemple dans lequel la durée de conservation d’un actif immobilier impacte la fiscalité.

L’article abordera les conséquences fiscales d’une durée de détention plus ou moins longue, en distinguant la situation des professionnels et celles des particuliers.   

On remarquera la difficulté de trouver dans ces règles une logique d’ensemble, dans la mesure où certaines favorisent une conservation longue, alors que d’autres au contraire incitent à revendre rapidement.

Durée de détention et fiscalité des professionnels de l’immobilier

Les professionnels peuvent être des marchands de biens ou promoteurs immobiliers. Il convient d’analyser leur situation au regard des différents impôts dont ils sont redevables.

Droits d’enregistrement : prime à une rotation régulière du stock immobilier

Les marchands de biens bénéficient d’un régime particulier en matière de droit de mutation à titre onéreux. A condition de s’engager à revendre l’actif sous un délai de 5 ans, le taux des droits d’enregistrement s’élève à environ 0,715%.

Du côté des promoteurs, la même logique s’applique. S’ils s’engagent à produire un immeuble neuf dans le délai de 4 ans après acquisition, l’achat bénéficie d’un régime de faveur en matière de droits d’enregistrement. Seul un droit fixe de 125 € s’applique.

En incitant fiscalement les professionnels à une revente et/ou construction rapide, le législateur entend favoriser un renouvellement régulier du parc immobilier.

Ce choix entraine certes une perte de recettes importante pour les collectivités locales, dont une grande partie du budget repose sur les droits d’enregistrement. Notons toutefois que le marchand de biens n’est qu’un intermédiaire dans la vente d’un actif immobilier. Après rénovation, il revend très souvent le bien immobilier au profit d’un particulier, lequel paiera les droits d’enregistrement au taux normal.

Cette remarque ne vaut toutefois pas pour les promoteurs immobiliers, puisque la vente d’un immeuble neuf relève des droits d’enregistrement à taux réduit. Cette règle a pour corollaire l’application de la TVA au taux de 20% sur le prix de vente.

Relevons au passage qu’en matière de TVA également, le législateur a entendu faire du facteur temps l’un des curseurs gouvernant la qualification d’un régime fiscal particulier. Pour rappel, l’article 257 qualifie d’immeubles neufs ceux non achevés depuis plus de 5 ans.  

En synthèse, les règles applicables en matière de droits d’enregistrement incitent les professionnels de l’immobilier à des durées de détention très courtes.

Plus-values professionnelles : aucun dispositif spécifique

A l’inverse des droits d’enregistrement, aucune règle n’existe en matière de plus-value pour inciter les professionnels à vendre leurs biens immobiliers rapidement.

Rappelons que les actifs immobiliers sont inscrits en stocks et non en immobilisations. Ils ne font ainsi l’objet d’aucun amortissement déductible pendant la période de conservation. En parallèle, la plus-value se détermine par simple différence entre le prix de vente et le prix de revient global. La notion de « valeur nette comptable » n’existe pas.

Alors que les professionnels ne bénéficient d’aucun avantage à conserver durablement leurs actifs immobiliers, il en va différemment des particuliers.

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Durée de détention et fiscalité immobilière des particuliers

La situation des particuliers peut s’avérer parfois paradoxale.

Plus-value immobilière : incitation à la conservation du patrimoine

Quasiment chaque année, le sujet de la durée de détention revient dans les discussions parlementaires. Faut-il exonérer les plus-values réalisées par les particuliers et si oui, faut-il primer une durée de détention courte ou longue ?

A ce jour, on rappellera que la résidence principale bénéficie d’une place à part dans ce débat, ce qui lui vaut la définition indirecte d’une niche fiscale que certains peuvent d’ailleurs critiquer.

Or ce cas particulier, le législateur a fait le choix de favoriser la détention longue en exonérant d’impôt les plus-values portant sur des biens détenus depuis plus de 30 ans. Cette règle vise à limiter la spéculation immobilière.

Cette incitation à « garder longtemps » est renforcée par un taux de droits d’enregistrement sensiblement plus élevé que pour les professionnels. Il s’agit en effet d’un taux d’environ 5,80%, ce qui peut avoir tendance à freiner la multiplication des transactions.  

Notons qu’il n’est pas nécessaire de conserver son bien immobilier 30 ans pour bénéficier d’un traitement fiscal de faveur à la revente. Dès 5 ans de détention, un forfait travaux de 15% peut permettre de majorer le prix d’acquisition (et ainsi réduire la plus-value taxable). D’autre part, une détention d’au moins 22 ans permet d’être exonéré d’impôt sur le revenu, de surtaxe, ainsi que de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus.

IFI et transmission de patrimoine immobilier

L’IFI se calcule sur la valeur nette du patrimoine immobilier. Depuis 2018, le législateur a durci les règles s’agissant des passifs déductibles. Les comptes courants d’associés sont en principe exclus et les prêts bancaires qui sortent de l’ordinaire ne permettent plus d’optimisation fiscale. On peut par exemple citer le cas des prêts in fine qui doivent être fiscalement amortis, tout comme le prêt Lombard et autres conventions de prêts sans termes.

En conséquence de ces nouvelles règles, la dette bancaire n’est plus éternelle au plan fiscal.

Dès lors que l’emprunt diminue chaque année, la valeur nette des actifs immobiliers augmente mécaniquement et l’IFI avec.

Les stratégies de refinancement sont bien souvent bancales et le risque d’une qualification d’abus de droit freine les conseils à ce sujet, sauf cas particulier. Le seul moyen de stopper l’augmentation de la valeur nette du patrimoine étant de vendre les actifs, certains y verront une incitation au renouvellement du patrimoine immobilier, d’autres un signe de plus de désaffection pour cet actif de la part du législateur. 

En matière de transmission, et partant du postulat que les biens ont été financés par emprunt, le raisonnement à adopter est le suivant.

Transmettre le bien directement ne permet pas de profiter de l’emprunt sur l’assiette taxable, sauf à donner la dette en même temps ce qui est souvent compliqué. 

En revanche si l’acquisition a eu lieu via une société, transmettre les parts sociales dès l’acquisition permet de donner sur la base d’une valeur quasiment nulle. A l’inverse, plus le donateur patiente avant de donner, plus la valeur des parts augmente et la transmission aura un coût fiscal. 

Dès lors, même si la durée de détention n’influe pas directement sur l’IFI et la transmission, le temps qui passe a toujours des conséquences indirectes sur la fiscalité immobilière.


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