La SARL de famille permet d’optimiser fiscalement la transmission de son patrimoine immobilier tout en bénéficiant d’un régime fiscal avantageux sur les revenus locatifs. En effet, par exception à l’assujettissement à l’IS, la SARL de famille relève du régime des sociétés translucides. Le résultat se détermine au niveau de la société mais les associés supportent l’impôt sur le revenu.
En matière de fiscalité immobilière, il s’agit très souvent des règles des bénéfices industriels et commerciaux (LMNP par exemple). Ces règles de détermination du résultat sont favorables aux investisseurs débutants qui n’ont pas l’intérêt d’immatriculer une société relevant de l’IS.
La SARL de famille peut donc être opportune à propos d’une acquisition immobilière destinée à la mise en location meublée saisonnière. Cela vise par exemple le cas d’un appartement acheté par un couple à la montagne, loué via la plateforme Airbnb ou Booking. Si le foyer se limite à 23.000 € de recettes locatives annuelles, les règles LMNP s’appliqueront et un déficit fiscal sera probablement comptabilisé la première année d’exploitation.
Cependant, lorsque l’investisseur associé de la SARL de famille souhaite conserver la jouissance privative du bien pendant quelques semaines par an et y habiter personnellement, un risque majeur mérite d’être signalé.
Les conditions fiscales du régime des SARL de famille
Ce régime dérogatoire au droit commun nécessite une option expresse. Cette option répond à des conditions de fond, de forme et de délai.
Ces conditions ressortent notamment de l’article 239 bis AA du code général des impôts. Il en existe principalement deux.
La condition tenant au caractère familial de la SARL
Une SARL constituée entre personnes non parentes relève automatiquement de l’impôt sur les sociétés. Elle ne peut pas opter pour le régime des sociétés de personnes.
Il faut que les associés présentent un lien familial suffisamment étroit pour que l’option soit ouverte. Le régime fonctionne notamment entre parents en ligne directe, frères et sœurs ou encore couples mariés ou pacsés.
La présence d’un seul tiers étranger suffit à remettre en cause le régime optionnel. Ainsi, une SARL constituée entre deux époux, leurs deux enfants et une société holding ne peut pas opter pour ce régime fiscal. Les clients sont généralement bien au fait de cette condition et les difficultés pratiques demeurent assez rares.
La condition tenant à l’activité de la SARL de famille
Une SARL présente toujours une forme commerciale mais peut parfaitement exercer plusieurs types d’activités (civile ou commerciale notamment). En matière de fiscalité immobilière, il s’agit régulièrement de la location, de l’achat revente, ou encore de la promotion.
Pour opter, la SARL doit exercer une activité industrielle, artisanale, agricole ou commerciale.
L’achat d’immeubles en vue de leur revente constitue par nature une activité commerciale, tout comme la promotion immobilière. Elles sont donc toutes les deux éligibles au régime optionnel. Cependant, on voit assez rarement en pratique un marchand de biens immobiliers faire opter sa SARL au régime des sociétés de personnes.
La location meublée constitue une activité civile au plan juridique. Cependant, l’article 35 I 5° bis du code général des impôts prévoit expressément qu’il s’agit d’une activité commerciale au plan fiscal. Par conséquent, une SARL peut opter pour le régime des « SARL de famille » en procédant à de la location avec meubles. Autrement dit, la location saisonnière s’inscrit parfaitement dans l’objet social d’une SARL de famille.
Il faut cependant faire attention à ce que la SARL n’exerce pas, en plus de son activité de location meublée, une activité qui aurait une nature civile.
L’activité civile d’une SARL de famille présente un risque fiscal
Le non-respect de la condition liée à l’activité fait supporter un risque aux associés de la SARL.
L’occupation privative d’un bien donné habituellement en location saisonnière
Il arrive fréquemment que les associés souhaitent profiter personnellement du bien pendant quelques semaines chaque année. Cette occupation, souvent gratuite, s’assimile à une jouissance privative d’un bien composant l’actif de la SARL. Au plan fiscal, il s’agit d’une activité civile par nature, puisque aucune contrepartie ne bénéficie à la société.
Or une SARL de famille ne peut par principe pas exercer une activité civile, puisque ce type d’activité ne figure pas dans la liste de l’article 239 bis AA. En cas de contrôle fiscal, l’administration fiscale pourrait remettre en cause la validité de l’option de la SARL. La conséquence directe serait alors un assujettissement de plein droit à l’IS. L’imposition du résultat annuel serait quasi identique puisque les règles IS correspondent peu ou prou ou règles des bénéfices industriels et commerciaux. En revanche, la fiscalité immobilière à la revente serait plus pénalisante à l’IS. En effet, la plus-value sur le bien relèverait des règles commerciales et non plus des règles applicables aux particuliers. Il s’en suivrait un régime d’imposition défavorable pour les associés investisseurs.
Les associés souhaitant profiter du bien acquis par la SARL doivent donc prendre garde à cet écueil. Consulter un professionnel de la fiscalité immobilière meublée peut s’avérer un choix judicieux. Parmi les solutions envisageables pour contourner le problème figure le versement d’un loyer. En matière de BIC et contrairement aux règles IS, on pourrait même se contenter d’ajouter la valeur locative au résultat imposable, sans que l’administration ne puisse exiger un flux réel. Autrement dit, le simple fait de fiscaliser le loyer théorique dans le résultat de la SARL de famille suffirait à remplir ses obligations, sans avoir à le verser de manière effective.
L’exception pour les activités civiles accessoires
On sait que si le montant des recettes commerciales d’une société civile n’excède pas 10% de ses recettes totales, la société relève toujours de la translucidité fiscale.
A la différence des sociétés civiles immobilières, il n’existe pas de tolérance similaire pour les SARL de famille. Autrement dit, le seuil de 10% des recettes applicables aux SCI ne peut pas être revendiqué.
Pourtant, le Conseil d’Etat a déjà jugé que l’exercice d’une activité civile par la SARL de famille ne lui faisait pas automatiquement perdre le bénéfice de son régime fiscal. Pour cela, le juge indique qu’il faut que l’activité civile soit accessoire et indissociable de l’activité commerciale. La notion restrictive d’activité indissociable aboutit très souvent à l’impossibilité de revendiquer cette exception. En effet, l’usage gratuit d’un bien ne constitue pas, par principe, le complément indissociable de l’activité de location meublée.
Nous conseillons donc aux investisseurs immobiliers en meublé de ne pas prendre cette exception pour acquise. Il sera préférable de structurer différemment votre acquisition et adapter la détention avec un avocat spécialiste en fiscalité immobilière.
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